Ethiquable, l'entreprise visionnaire détenue par ses employés en SCOP, prouve que la qualité pour les papilles gustatives est propice au développement durable.
On dit qu'il n'y a pas de gastronomie sans vin. On peut donc se demander s'il y a une gastronomie sans pâtisserie française. Je donne à la pâtisserie un P majuscule, car il s'agit d'un concept à part entière, et non d'une simple pâtisserie.
En fait, partout en France, les gens aiment tellement regarder des émissions sur la pâtisserie qu'elle devrait être utilisée pour enseigner la chimie dans les lycées, et bien d'autres concepts précieux. Tout à coup, en comprenant l'intérêt de la chimie appliquée, les élèves trouveraient de l'intérêt à cette discipline et les notes feraient des bonds en avant. La pâtisserie est la symbiose parfaite entre la science et l'art, un véritable domaine Leonardien.
En France, la pâtisserie est presque une religion. D'ailleurs, lorsque les Allemands ont inventé l'expression " Wie Gott in Frankreich " ou " Comme Dieu en France ", c'est peut-être à la pâtisserie qu'ils pensaient. Sa finesse, son inventivité et son esthétique ne se rencontrent nulle part ailleurs dans le monde, en tout cas avec autant d'abondance. J'oserais même dire que le mot Gourmandise a été créé dans le seul but de permettre à tous de s'adonner à cette passion sans être en proie aux remords ou aux flammes de la gloutonerie. Pour preuve, je vous mets au défi de trouver une traduction décente de " Gourmandise " dans n'importe quelle autre langue (autre que l'italien :).
La pâtisserie elle-même est également très dépendante d'un ingrédient important sans lequel beaucoup d'entre nous seraient vraiment dépressifs, à savoir le chocolat. Imaginez un Tiramisu sans une fine et délicate poudre de cacao ? Ce serait comme Paris sans la tour Eiffel ! Ou un anniversaire sans gâteau aux trois chocolats ? Que dis-je, ce serait comme Noël sans les lumières !
Alors, quand mon amie Marina m'a proposé de découvrir un chocolatier du Sud-Ouest de la France, mes papilles et mes neurones se sont mis à clignoter. D'autant plus que cette entreprise de produits biologiques est une SCOP qui a pour vocation d'améliorer les conditions sociales et environnementales tout en apportant de la qualité au palais et à la pâtisserie.
Ethiquable a fêté ses 20 ans d'existence en 2023 avec un chiffre d'affaires de 75 millions d'euros. Ce n'est pas Google, mais c'est certainement beaucoup mieux que la plupart des entreprises avec lesquelles j'ai travaillé ou que j'ai consultées.
L'entreprise a démarré dans une petite ville appelée Fleurance, au milieu du département du Gers. C'est l'un des endroits au monde que l'on peut appeler "pays de cocagne", où l'abondance est telle qu'il peut être tentant de ne point faire d’effort, du moins c'est ce que m'ont dit les fabricants d'Armagnac. Les fruits et légumes de toutes sortes sont abondants, il suffit de se promener dans la campagne pour les cueillir et profiter de la chaleur du soleil qui mijote tendrement dans la peau épaisse et savoureuse de la figue.
Le projet est ambitieux : livrer des produits de qualité tout en assurant une rémunération équitable aux producteurs, de Cacao notamment, en leur offrant souvent le double du prix du marché pour le café ou les fèves de cacao. À l'évidence, si l'on considère la croissance et les investissements, ce projet était visionnaire en 2003 et c'est une solution gagnante si l'on considère les résultats d'aujourd'hui. Et cela ne fait que s'améliorer.
L'un des principes fondamentaux de la gastronomie est de commencer par des produits de qualité. Si l'on met de la qualité, on peut avoir de la qualité mais aussi de la m…., comme dirait notre regretté Jean-Pierre Coffe : c'est le facteur humain. Mettez de la m…. et vous n'obtiendrez que de la m…, quel que soit le facteur.
Mais pour obtenir des produits de qualité, il faut valoriser les personnes. Ethiquable semble le faire assez bien, tout d'abord en payant davantage, mais aussi en travaillant en amont pour impliquer les agriculteurs dans le processus global, par le biais de coopératives notamment. Différentes étapes sont abordées en amont, au Pérou par exemple, à travers le développement d'un savoir-faire et d'un langage commun pour définir des normes de qualité. La formation au goût est au menu pour permettre à ces acteurs clés de la chaîne du goût de comprendre les exigences. Ainsi, la responsabilité de la garantie du goût est déplacée en amont et le haut niveau initial de qualité et de saveur n'est pas rompu.
Autre avantage, ce contrôle et ce suivi de la qualité permettent de mettre en avant un grand concept français, celui du terroir : le goût d'un produit est profondément enraciné dans le sol et le climat qui le nourrissent. Ainsi, on peut déguster un chocolat pur à 80% d'Equateur, à 85% de Madagascar ou à 88% de Côte d'Ivoire grâce à l'approche d'Ethiquable. Des saveurs pures et distinctes ! Et le pourcentage n'est pas l'origine, c'est la quantité de chocolat ! Voilà ce que l’on appelle une tablette de chocolat !
Déplacer le savoir-faire en amont permet aussi d'expédier de plus petites quantités de meilleure qualité. Car à quoi bon expédier des produits médiocres qui seront jetés une fois à Fleurance ?
Ensuite, en aval, Ethiquable a investi 20 millions d'euros dans des équipements industriels à Fleurance afin d'améliorer son intégration verticale et d'accroître ainsi sa capacité d'innovation.
Comme me l'expliquait Christophe Eberhart, l’un des trois dirigeants de l’entreprise, le fait d'être une SCOP nécessite beaucoup de communication : les employés possédant une bonne part de l’entreprise, il est nécessaire d’expliquer dans le détail et à un grand nombre de personnes pourquoi un tel investissement a du sens.
Si une SCOP nécessite beaucoup de communication, avoue le dirigeant, elle offre aussi beaucoup d'implication de la part de salariés qui cherchent de plus en plus à donner du sens à leur travail et à mener des actions qui ont un impact, que ce soit sur la société ou sur l'environnement. En même temps, ils disposent d'un outil de production qu'ils considèrent comme le leur, dont ils sont fiers, tout en prolongeant cette implication en amont, auprès des producteurs de cacao à des milliers de kilomètres.
Des salariés qui passent d'un « bullshit job » à un emploi qui a du sens, des clients qui passent d'une tablette de chocolat médiocre à une tablette de chocolat qui a du goût, des producteurs qui passent d'une rémunération lapidaire à une rétribution constructive, que demander de plus !
Il s'agit notamment de mettre en avant le goût en tant que promoteur du développement économique, du bien-être humain et de la durabilité. Comme je le développerai dans un prochain article sur les guimauves, manger moins et mieux est la voie à suivre, et l'adulation des papilles gustatives est une nécessité !
Vive le Chocolat ! Vive le Palais !
Image by Dall.E, prompt "Un vitrail en verre coloré représentant une tablette de chocolat".
Je dois avouer que je n'ai aucune idée de la raison pour laquelle cet algorithme ne peut pas épeler correctement le mot chocolat .
Comentarios